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Paul ARIES - Site Officiel
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9 juin 2014

Les fils de McDo La McDonalisation du Monde

Bien plus qu'un pamphlet anti-McDo

Alternatives économiques

 

 


José Bové Millau Juin 2000-Part 2 par fantomasie

 

Dans alternatives économiques (1997)

Bien plus qu'un pamphlet anti-McDo, ce livre est une véritable psychanalyse de la multinationale au sens freudien du terme. Sur l'analyse des stratégies marketing comme sur celle du management, l'auteur multiplie les interprétations originales pour dévoiler un système à donner froid dans le dos. Dans une approche plus économique, il montre aussi les ressorts du système McDo: taylorisation poussée, standardisation, relations avec les clients … Après avoir lu ce livre, rien ne sera plus comme avant au McDo, si toutefois vous y allez encore.

Sur le site de l'Ecole de Management de Grenoble

La relation au travail selon Paul Ariès

Paul Ariès est un politologue et écrivain d’origine lyonnaise, il s’intéresse à des sujets comme la malbouffe et les sectes qu’il met en parallèle avec la mondialisation. Membre du jury international de l’association Slow Food, il a aussi enseigné la science politique mais aussi l’histoire et la sociologie au cours de sa vie. Il est un acteur important dans la réflexion autour de la décroissance. Il se présente comme portant deux casquettes : celle de politologue spécialiste de la mondialisation et celle de citoyen. En effet il a été pendant de nombreuses années président de l’ONG Centre Europe Tiers-Monde qui lutte contre le trafic d’organes et cherche à protéger l’enfance (l’enfant au travail et l’enfant en tant que consommateur). Il est également acteur dans la lutte contre les sectes (scientologie, sectes sataniques, etc..) et les analyse comme « des métastases d’une société malade ». Il compare d’ailleurs les pratiques sectaires au management aujourd’hui. En effet selon lui les dynamiques de groupe auxquelles sont sujets les « tops managers » s’apparentent aux rites des sectes et peuvent être très perverses (ex : stage du petit chat dénoncé par Loïck Roche, stage utilisé chez les SS mais au sein de groupe de cadres également).

DEFINITION DE L’ECONOMIE DE MARCHE

L’économie de marché se définit selon quatre principales caractéristiques selon Paul Ariès. En effet l’économie de marché correspond tout d’abord à une création de richesse très efficace, J. Lacan disait d’ailleurs que « le capitalisme crèvera par sa trop grande efficacité ». L’économie de marché est également une inversion du cycle marchand. C’est-à-dire que nous sommes passé d’une marchandise que l’on troquait contre de l’argent pour pouvoir se réapproprier une autre marchandise (modèle M-A-M), c’était l’utilité des choses que l’on cherchait, on ne stockait pas, on n’accumulait pas, à un capitalisme sur le modèle A-M -A qui correspond désormais à « j’ai de l’argent, je troque contre une marchandise pour avoir à nouveau de l’argent ». Ce schéma A-M-A a deux conséquences : une contrainte d’accumulation et d’accélération. Désormais pour accélérer le cycle, dans une société qui vit à toute vitesse, on coupe les stocks pour produire en flux tendu, on encaisse les créances très rapidement, ou on achète et revend des produits déjà finis, toujours plus vite. L’accélération est si forte que l’on tend même vers un cycle A-A’-A’’ où l’on ne passe plus par une marchandise mais où l’on crée de l’argent avec de l’argent même. L’économie de marché est également une imposition de style de vie. Elle prône la société de consommation, société dans laquelle nous avons appris à entretenir de nouveaux rapports aux objets. En effet nous accumulons les choses et tout réside dans le paraitre. Pour donner un exemple, Paul Ariès explique qu’avant l’économie de marché, selon les milieux sociaux on retrouvait une certaine table : lapin chez les paysans, porc pour les ouvriers et veau pour les bourgeois. Désormais tous mangent du poulet (fermier ou bio pour les uns, venant du supermarché pour les autres). La culture populaire est devenue sous-produit de la culture dominante, elles consomment la même chose mais de qualité différente. Avec l’économie de marché il y a une différence de pouvoir d’achat, de prix mais il y a une standardisation des objets, nous consommons tous les mêmes choses, les mêmes produits. Les angoisses existentielles ou la peur de mourir trouvent également une réponse à travers l’économie de marché. En effet grâce à la croissance et à toujours plus de croissance, grâce à l’accumulation de pouvoir, d’objets, le maitre mot devient « le plus est l’égal du mieux ». La consommation permet aux individus de se sentir mieux selon le dictat de l’économie de marché.

LA CONCEPTION DU TRAVAIL

Paul Ariès nous communique quelques chiffres :
- 500 000 victimes de harcèlement sexuel dans les entreprises
- 2 000 000 de salariés se disent maltraités au travail
- 2 personnes sont tuées chaque jour lors d’un accident du travail
- 67% des salariés n’aiment pas ce qu’ils font et n’en voient pas l’utilité à part gagner du pouvoir d’achat Le travail peut être vu selon deux conceptions au cours de l’histoire. En effet le travail peut être le tripalium, l’objet de torture, la sanction du péché originel, mais il peut également être l’opus, la création, grâce au travail l’homme pourrait être alors l’égal de Dieu, il deviendrait créateur lui aussi. Douglas Mac Gregor plaçait les salariés dans deux catégories, assez proche de la conception précédente :
- les individus moyens qui auraient une aversion naturelle pour la travail, qu’il faudrait sanctionner, menacer. Ces individus rechercheraient cette sanction car cela les dirigerait, leur permettrait de fuir toutes responsabilités. L’entreprise prendrait en charge ces individus.
- les individus qui seraient des créateurs nées, ce groupe serait très minoritaire. La conception du travail se retrouve également chez Herzberg, acteur essentiel dans les théories générales du management, pour qui l’humanité laborieuse vit de deux mythes originels :
- mythe d’Adam selon lequel le travail est la sanction du péché originel
- mythe d’Abraham, l’homme devrait en tant qu’émissaire de Dieu poursuivre sa création Mais pour Paul Ariès il faut aller plus loin que ces conceptions et historiciser la conception du travail.

HISTOIRE DU TRAVAIL

L’histoire du travail est l’histoire du dépouillement pour Paul Ariès. Le contrat de travail suppose un lien de subordination, ce qui est le premier dépouillement du salarié, être subordonné à son patron. De plus le travail découle du servage et présente un vrai dépouillement du savoir-faire et du savoir-être. L’entreprise s’approprie le recrutement, la RH, par exemple. Avant, les employés étaient recrutés par les employés qualifiés, or maintenant c’est par la direction de l’entreprise. Paul Ariès présente quatre étapes dans l’histoire du travail :
- le Fayolisme. H. Fayol, précurseur du management, inventeur de la fonction administrative, de la bureaucratie. Il critique le patronat en disant qu’il est exclusivement préoccupé par argent et pouvoir et pas assez par le fonctionnement. Il invente également l’entreprise caserne. On utilise alors le modèle militaire avec un chef unique mais cela n’est viable que si le modèle est juste pour Fayol. En effet s’il y a ordre et justice alors la main d’oeuvre sera disciplinée. C’est l’origine du paternalisme (ex : Michelin).
- Taylorisme. Taylor est ingénieur des méthodes, utilise le chronométrage et refuse l’autonomie ouvrière. En effet il pille les savoir-faire des meilleurs ouvriers pour les imposer aux autres et il va mettre en place un processus de déqualification de la main d’oeuvre. Le taylorisme sera alors condamné en 1912 par une commission d’enquête parlementaire américaine puisque c’est un système où le bon salarié n’aura plus sa place. Le Taylorisme est résumé par Paul Ariès à « travaille et tais-toi ».
- Fordisme. C’est l’accès à la société de consommation (entre deux guerres aux EU, après guerre en France), les Trente Glorieuses. Cela fonctionne en apparence mais c’est un pillage du Sud et des conséquences écologiques désastreuses aujourd’hui. Pour Paul Ariès le fordisme c’est « travaille, tais-toi et consomme ». Ce modèle fordiste ne résistera pas à la crise des années 1970, à la concurrence des NPI, et aux mécontentements des 50% d’ouvriers spécialisés ayant le BAC (absentéisme, sabotage, en 1976 une voiture sur deux qui sort d’une usine Renault est sabotée).
- Mangement postfordiste. Le travail est précaire, mal payé, le rapport au travail change car c’est la fin du travail pour tous. Il y a une certaine démotivation et l’entreprise devient un lieu de passage, transitoire. Les CDD se développent et la seule mobilité possible est celle horizontale. Pour résumer cette histoire du travail Paul Ariès partage l’idée que nous sommes passés d’un paternalisme à un maternalisme. Aujourd’hui, l’entreprise est une mauvaise mère, le management est affectif (les patrons et employés se tutoient, parlent de leurs enfants, création de fausse proximité alors que l’entreprise n’est pas le lieu pour de telles relations), la qualité est totale, dans le travail tout devient important et finalement plus rien ne l’est vraiment et l’écart entre travail prescrit et réel est toujours bien présent.

LES DIFFERENTS MANAGERS

Selon Paul Ariès il existe différents types de managers. Nous retrouvons donc :
- le manager oral, il utilise l’oral, il communique beaucoup et il souhaite faire naître des choses chez le salarié. Le manager attend d’être reconnu, aimé et s’il reçoit une critique il s’écroule. Il prive les salariés d’émettre des critiques ou de parler, le manager oral est très bavard mais réduit les autres au statut d’impuissants.
- le manager anal, il est dans l’action, il cherche à dominer, tout est aussi important pour lui. Il renforce la pression hiérarchique et développe une stratégie d’identification à l’entreprise.
- le manager phallique, pour lui l’entreprise est un champ de bataille. Il est spécialiste des petites fiches sur le personnel, sur des éléments anodins (le nom des enfants du salarié par exemple).

LE MANAGER GENITAL, IDEAL DU SLOW MANAGEMENT

Toujours selon la classification de Loïck Roche, Paul Ariès, présente le manager de degré le plus élevé dans la hiérarchie des plaisirs psychanalytiques : le manager génital, qui trouve son propre plaisir dans le plaisir d’autrui. Le manager génital considère ses collaborateurs comme des personnes autonomes, et la proximité avec eux n’est pas une source d’angoisse. Ce type de management requiert d’avoir atteint un degré suffisant de maturité personnel et professionnel. Le manager génital fonde son action sur deux principes fondamentaux :
- Respecter de la dignité des hommes Le respect de la dignité suppose aussi de créer les conditions qui permettent cette dignité. C’est aussi bien le respect du salarié en tant que personne qu’en tant que producteur. C’est également la reconnaissance de la qualification et de l’autonomie en tant que chemins menant à cette dignité. C’est enfin l’acception et l’intégration de l’erreur comme partie intégrante du travail.
- Renoncer à motiver C’est renoncer à considérer la motivation comme une technique déconnectée de son objet. C’est abandonner la vision instrumentale de la motivation qui pourrait théoriquement être appliquée quelque soient le contenu ou les conditions de travail. C’est voir la motivation comme un résultat (il s’agit alors de créer les conditions de travail qui engendrent la motivation) plutôt comme un instrument.

LA REMISE EN CAUSE DES TEMPS RAPIDES

Depuis un siècle et demi, tous les efforts de nos sociétés se sont portés sur l’invention de prothèses à accélérer le temps. Le travail à la chaîne, les moyens de transports, l’informatique et le fast-food sont quelques exemples de cette obsession pour les temps rapides. Or, nous dit Paul Ariès, remettre l’humain au coeur du travail, mais aussi plus largement au coeur de la société, c’est accepter de remettre en cause les temps rapides. Reconnaitre l’espace entre travail prescrit et travail réel par exemple, condition comme nous l’avons vu précédemment, de la dignité humaine au travail, cela prend du temps. Il s’agit donc désormais d’inventer des prothèses à ralentir le temps. Des prothèses qui peuvent être techniques (écrans de veille automatiques, cessation de l’éclairage des rues de nuit) ou sociales (slow food, villes lentes) Ralentir, ce n’est pas seulement réduire sa vitesse, ce n’est pas qu’un affaire quantitative. C’est au contraire premièrement une affaire de qualité. Ralentir, c’est « rendre au temps son épaisseur, sa densité ».

LA CONTINUITE ENTRE PRODUCTION ET MANAGEMENT, OU L’INFANTILISATION CHEZ MAC DONALD

A travers l’exemple de Mac Donald, Paul Ariès montre comment la conception de la production se prolonge dans la conception du management. En l’occurrence, c’est ici un modèle d’infantilisation particulièrement poussé qui anime aussi bien la production que le management. On retrouve en effet le même triptyque à ces deux niveaux. Au niveau de la production :
- Infantilisation du consommateur : à travers la satisfaction d’un palais reptilien par des sensations organoleptiques primaires, basiques (sucré, salé, croustillant), infra-culturelles (pour être mondialisées) sans oublier la manipulation publicitaire.
- Un substitut maternel : le Big Mac, un substitut au sein maternel : forme, consistance, douceur, chaleur, de la main à la bouche.
- Un substitut paternel : l’hygiène et la techniques (les fameuses 6000 fiches techniques) Au niveau du management :
- Infantilisation du salarié : « équipier » sans aucune qualification spécifique
- Un substitut maternel : l’entreprise elle-même, prétendument aimante et chaleureuse
- Un substitut paternel : le manager, le chef Il est clair que c’est le même modèle qui s’applique à la production qu’au management. Nous verrons par la suite qu’il ne peut véritablement y a voir de slow management sans une remise de la production.

UNE VISION PARTICULIERE DE LA MOTIVATION

La motivation peut être de deux types :
- intrinsèque : elle découle du contenu même du travail ou de ses conditions de réalisation.
- extrinsèque : elle est considérée comme un technique déconnectée du travail lui-même. Aujourd’hui, selon Paul Ariès, on constate un glissement provoquant un net déséquilibre en faveur de la seconde conception de la motivation. C’est la raison pour laquelle on assiste à une explosion des stages destinés à développer la motivation des salariés en entreprise. Comme si la motivation était « un muscle que l’on peut faire travailler ». Concomitamment s’est opéré un renversement de la pyramide des besoins de Maslow. Les chantres de la motivation-instrument semblent croire que l’on peut satisfaire les besoins supérieurs d’estime de soi, de reconnaissance et d’appartenance, en négligeant totalement les besoins inférieurs de sécurité (stabilité de l’emploi, du salaire, des liens sociaux, de la qualification) et physiologiques (conditions de travail, sécurité, hygiène).

QUELLE ETHIQUE POUR LES STAGES D’ENTREPRISES ?

Anaïs DIET a étudié et analysé différents types de stages d’entreprise : les stages de communication et les stages de motivation. Pour elle, les stages de communication fonctionnent sur un modèle anti-maternel car ils sont empreints d’une très grande violence qui vise à déstructurer, à briser les liens, voire à tuer symboliquement les stagiaires. Ainsi, les jeux de « l’édredon » et du « Sphinx », régulièrement pratiqués en stage de communication, consistent à recevoir un torrent d’agressions verbales (bien réelles) ou physiques (simulées) de la part d’un collaborateur et de répondre à cette violence par des phrases d’approbation « c’est vrai », « c’est possible » voire même « je comprends ». Il s’agit d’apprendre à encaisser une très grande violence et à instrumentaliser sa voix, son regard, son corps pour réagir de façon « positive », il s’agit donc d’enseignement le détachement à travers une déshumanisation de son rapport à l’autre. Les stages de motivation, eux, fonctionnent, selon Anaïs DIET selon un modèle anti-paternel. Ils ont pour objectif de faire croire que tout est négociable, permis, possible. Ils mettent en scène le mépris de la loi, de la règle, en plongeant les stagiaires dans le chaos, en enlevant tous les repères et en désorientant au maximum. Qu’il s’agisse de marcher sur des braises, de s’allonger sur des planches à clous ou d’être confronté, de nuit, à un parcours semé d’embuches avec pour seul guide la voix du chef, équipé, lui, de lunettes nocturnes, l’objectif est à chaque fois le même : choquer pour motiver. De même, de très nombreuses entreprises tentent de développer la motivation de leurs salariés par des méthodes diverses, variées et lucratives : centre de vacances spécialisées, enseignement d’un bonze, salles d’anarchies, séances de rire, punching-ball, etc… Paul Ariès met en garde contre cette tendance et invite à se poser avant tout la question de la légitimité de ces techniques. L’entreprise doit-elle être le théâtre de ce genre de scène ? Quels sont les dangers et effets pervers de ces pratiques ? Dans quelle mesure cette tendance s’impose-t-elle aux salariés en dépit de leur volonté ? Est-il éthique de pousser un salarié à subir des agressions potentiellement traumatisantes, à prendre des risques physiques, à partager son intimité en livrant ses secrets, à adopter un comportement infantilisant ? La principale erreur, nous dit Paul Ariès, serait de croire que l’efficacité de ce genre de technique, si elle existe, leur tient lieu de justification, de légitimation. En aucun cas l’efficacité d’une technique n’est garante de son caractère éthique.

UN SURINVESTISSEMENT AFFECTIF AU TRAVAIL ?

Dans un extrait du film J’ai très mal au travail d’Isabelle Carré, nous voyons un manager de Dassault System Aviation avouer que « sur l’équilibre de [sa] vie », l’ensemble des facettes de son existence, s’il y avait un choix à faire, il choisira sans hésiter son travail. Paul Ariès souligne la radicalité de ces paroles, pourtant dites de manière relativement banale, et nous invite à nous interroger : quel rapport entre ce surinvestissement identitaire vis-à-vis du travail et la souffrance vécue au travail ? N’est-il pas normal qu’à ce degré d’attachement affectif, la moindre carence provoque une souffrance aigüe ?

LA JUNK PRODUCTION, OU LA BASE DU PROBLEME

Comme nous l’avons vu précédemment, les modèles de production se répercutent bien souvent sur les modèles de management (cf. exemple de Mac Do). Réciproquement, il n’est pas imaginable d’atteindre un slow management sans remettre en cause les méthodes et le contenu de la production aujourd’hui apparenté pour une large part à de la « junk production ». La « junk » production ou production « pourrie », viens du terme « junk food » inventé dans les années 70 pour désigner les produits alimentaires de qualité inférieure et responsables de l’augmentation de l’obésité. Ainsi, la junk production n’est pas seulement pourrie par la manière de produire (avec des effets dangereux pour le salarié et l’environnement) mais par le contenu lui-même de la production. Au-delà du produit, la junk food implique des méthodes de production aberrantes et inhumaines : des poulets élevés en 40 jours, gavés des farine animales, et dont on coupe le bout de ailes pour gagner de la place et des porcs rendus aveugles pour qu’ils mangent plus. Le terme s’est généralisé et s’applique depuis à de nombreux domaines de la production, des junk spaces (l’esthétique du centre commercial dévorant la ville) à la junk santé (surconsommation de médicaments dont on estime que 40% n’auraient pas d’effets ou des effets négatifs). La junk production intègre aussi des pratique comme « l’obsolescence programmée » ou la production de biens d’équipement volontairement fragilisés, faits pour ne pas durer au-delà d’un certain nombre d’utilisation, dans le but avoué d’entretenir un rythme soutenu du besoin de consommation, alors qu’on aurait tout à fait les moyens de produire des biens infiniment plus durable. On observe concomitamment la généralisation des effets de mode, qui des vêtements féminins au début du XXe siècle, concernent aujourd’hui aussi bien l’habillement des hommes, des enfants, la décoration de la maison, le high tech ou le divertissement. Même objectif / résultat : l’accélération du rythme du besoin de consommation. Enfin, la junk production fonctionne aussi sur le ressort de la dégradation et la banalisation des objets, par leur production de masse, leur foisonnement inimaginable et l’explosion de leur nombre dans les foyers. Prendre conscience de cette junk production, c’est comprendre qu’une production « saine » permettrait de satisfaire les besoins de l’ensemble des habitants de la planète. Nous ne sommes pas trop nombreux pour la terre, ce sont les priorités (aujourd’hui la production et la consommation de masse à tout prix) qui sont à revoir. A titre d’exemple, Paul Ariès cite ces chiffres désespérants : selon Jacques Diouf, patron de la FAO, 30 milliards de dollars par an seraient suffisants pour supprimer lafaim dans le monde. Nous sommes dans un monde où sont dépensés 1200 milliards de dollars par an pour l’armement, 900 milliards de dollars par an pour la publicité et 700 milliards de dollars par an pour les stupéfiants, mais où l’on ne « trouve » pas 30 milliards de dollars faire de la faim des hommes un mauvais souvenir. Sommes-nous trop occupés à faire (produire) des choses si passionnantes que l’on en oublierait l’essentiel ? Même pas, constate Paul Ariès, qui rappelle que le sondage selon lequel 67% des français disent ne pas aimer leur travail. On ne peut pas penser le slow management sans poser la question du but du travail, et donc sans remettre en cause la junk production.

LA PERVERSITE DE LA PUBLICITE

La publicité à connu plusieurs âges. D’abord, le « mythe du consommateur rationnel », qui a besoin, dit-on, de bonnes raisons pour acheter un produit. A cette époque, c’est le rôle de la réclame d’informer le consommateur et de lui donner les raisons objectives (vraies ou mensongères) d’acheter tel produit plutôt qu’un autre. La publicité s’adresse à l’intellect du consommateur. On s’est ensuite rendu compte que 90% des achats ne sont pas rationnels mais pulsionnels. C’est l’avènement de la publicité « suggestive », qui cherche à s’adresser directement à l’inconscient du consommateur. Cette publicité prend d’abord une forme « mécaniste », considérant selon le principe d’Huxley que mille répétitions font une vérité, et c’est le règne du matraquage publicitaire qui commence. Plus tard, on comprend que le consommateur n’est pas un individu passif mais qu’il est inconsciemment en demande d’un certain nombre de choses. On comprend également que la consommation joue le rôle d’une réponse pour un certain nombre de besoins psychologiques. Dès lors, il ne s’agira plus que de mettre en scène les produits à vendre comme des réponses à ces besoins, à ces névroses. Selon Georges Chetochine, président de l’Institut Européen du Marketing, le travail d’un publicitaire est de vendre des produits à des gens rendus malheureux par l’exploitation permanente de leurs névroses. Jouer sur des fantasmes archaïques, mettre en scène des produits comme des réponses à des névroses, entretenir le malheur des consommateurs et leur logique boulimique de « dévoration du monde », de consommation compulsive : ce sont les ressorts de ce qu’on appelle la publicité « comportementaliste ». Elle fait régner l’illusion que la consommation apporte non seulement le bonheur mais également l’identité, le sens. Aujourd’hui se profile également le neuro-marketing et ses techniques d’imageries du cerveau promettent une efficacité toujours plus grande de la manipulation publicitaire. En prenant conscience de la perversion de ces techniques manipulatoires, on comprend qu’il ne peut y avoir de slow management sans remise en cause de ces logiques publicitaires.

FACE A LA BANALITE, RESTER SUR SES GARDES

Paul Ariès conclue son intervention en nous enjoignant à faire attention à ce qui paraît ordinaire, ce qui semble banal. La force du système de surconsommation et de ces corolaires (junk production, manipulation publicitaire) réside dans le fait qu’il s’immisce dans les aspects les plus ordinaires de la vie, sous des formes les plus banales. La marque Carrefour ne fait-elle pas, chaque année, une étude pour être au courant de la manièredont les jeunes l’appellent ? Ne se réjouit-elle pas de l’appellation « Carrouf’ », apparemment un verlan absolument banal, interprété par la marque comme un signe positif d’appropriation ?

QUELQUES LECTURES

- Les Fils de MacDo, éditions L’Harmattan, 1997, Paul Ariès
- La Scientologie, laboratoire du futur ?, éditions Golias, 1998, Paul Ariès
- Petit Manuel Anti-McDo à l’usage des petits et des grands, éditions Golias, 1999, Paul Ariès
- Disneyland, le royaume désenchanté, éditions Golias, 2002, Paul Ariès
- Harcèlement au travail ou nouveau management, éditions Golias, 2002, Paul Ariès
- La Décroissance : un nouveau projet politique, éditions Golias, 2008, Paul Ariès
- Désobéir et grandir - Vers une société de décroissance, éditions Ecosociete, 2009, Paul Ariès

 

 

Plan de l'ouvrage les fils de McDo

L'Harmattan 1987 - Les fils de McDo
La McDonalisation du Monde

 

"Le monde est plein d'épaves éduquées"
Ray Kroc, fondateur de McDonald.'s (1980)


"Les animaux se repaissen t ; 11homme mange,
l'homme d'esprit seul sait mangerll
Brillat-Savarin (1820)

"La cuisine d'un peuple est le seul témoin exact
de sa civilisation"
Eugène Briffault (1846)
Editions L'Harmattan


McMenu de l'ouvrage
Première Partie: La Planète Mc l
1 - McDo aux mille visages 13
- MeVillage 14
- McDo Moscou 16
- McDo Los Angeles 18
- La France-MeDo 20
2 - L'usine à hamburgers 23
-McDo c'est simple 24
-McMenu 31
- McStandard 33
Deuxième partie: McToujours 39
1 - McSolitude 39
2 - A chacun son hamburger 41
-McNouveau 41
-McCyclique 46
-McQuotidien 47
-McPartout 48
-McGénération 50
Plan
Plan
3 - Si vous n'allez pas à MeDo, MeDo ira à vous
.;,McAutrement
-McDrive
-McSatellite -McMobile
-MeBus, MeTrain, MePéniche -Food Piazza -McDomicile
-McEmporté -McLivré
-Hearth Express -McGhetto

Troisième partie: McDo une alimentation infraculturelle 61
- McMiracle
- Le hamburger: un pur signifiant
1 - McDo ou la régression vers le corps biologique
-McHygiéniste -McSécuritaire -McDiététique
-McAceusé
- McDéfense
2 - McDo ou la manipulation du corps libidinal
-McFemme -Mc Maternel -MeIntime
Quatrième partie: La sauce McDo
1 - Marketing-produit selon McDo
-MeVente
-McPub
-McClient
-McMangeur
2 - Marketing-image selon McDo 92
- McPsy
- McUSA
- McCulture
- McTV

3 - McDo bien plus qu'un simple restaurant 100
- McFamille
- McEnfant
- McRonald
- McProvidence
- McIntégration
- McEcolo
Cinquième partie: McManagement 123
- McDollars
- McSecret
125
129
1 - Mcjob 129
-Equipier polyvalent: un job pas un métier
- McTravail
-McMannequin
- McTaylor
-McSourire
- McEquipe
2 - La McDonalisation des équipiers 149
-McNovice
-La McDonalisation de la pensée
- La McDonalisation du discours
- La McDonalisation du corps
3 - McDo : la "Société-Mère"
- McDo : L'entreprise "psy"
-McDo : ma seconde famille
-McEgo : la logique du développement personnnel
-McContrat
-McFétiche
-McSaga
-McPièges : Les dangers de l'entreprise "psy" -McFils
-McAmour, McHaine : vers un hygiénisme social
4 - PapaMc
- McManager 190
- L'équipe du Management Technique 191
-Le culte du manager 195
- Le Management Technique figure de la "toute puissance" 196
-McQualité Totale 199
-McCastration 203
-McMachinisme 209
- McEvaluation 211
- McFranchise 215

Extrait de l'Introduction

 

McMenu
McDonald's poursuit sa conquête du monde avec 15 700
restaurants implantés dans 83 pays et servant 30 millions de
repas par jour. Une nouvelle unité ouvre toutes les 7 heures.
L'Europe n'échappe pas bien sûr à cette invasion puisque
seuls trois petits villages résistent encore (Albanie, Bulgarie,
Roumanie). La France pays de la bonne chère ne fait pas
exception avec 353 unités et un chiffre d'affaires de 5,7 milliards
de françs. McDonald's avec son objectif de 20 000 restaurants
pour l'an 2 000 représente un véritable fait de société
et non un simple phénomène de mode ou de génération.
Cette transformation de la table identique d'un bout à l'autre
de la planète est logique puisque les experts de tous les pays
disent que le monde deviendra au XXle siècle un véritable village
planétaire: comment l'alimentation pourrait-elle échapper
à cette mondialisation? McDonald's constitue donc un
véritable laboratoire du futur inventant l'alimentation correspondant
à l'âge de la globalisation du monde et non pas simplement
une variante culinaire parmi d'autres. Cette
modernisation concerne chacun d'entre nous non seulement
parce qu'elle dessine ce que nous mangerons et comment
nous mangerons mais aussi parce que à croire un vieil adage
"on est ce que l'on mange". Quelle alimentation McDo concocte-
t-il donc dans ses marmites? A quoi ressemblera cet
homme qui sortira de ses milliers d'équations culinaires?
Cette McDonalisation du monde est préoccupante car elle
crée un cosmopolitisme alimentaire qui se donne comme universel.
McDonald's n'est en effet pas plus américain que chinois
ou français. Il a en effet bricolé pour la première fois
McMenu
dans l'histoire de l'humanité un produit alimentaire infraculturel
car la culture est précisément ce qui différencie les
hommes et freine donc l'homogénéisation des mangeurs. On
mangera demain partout la même chose, de la.même façon,
avec le même regard. Cette mutation est essentielle car elle
engendre de nouveaux standards alimentaires qui sapent peu
à peu les fondements de toutes nos cultures culinaires traditionnelles.
Que l'on ne s'y trompe pas en effet: McDo est plus
éloigné de la cuisine de nos grands-mères que ne l'était l'alimentation
la plus exotique qui soit. Le hamburger nous est
véritablement plus étranger qu'un plat de serpent. L'homme
mondialisé ne s'en rend déjà plus compte. Ce communisme
alimentaire à la Ubu est très inquiétant puisqu'on ne mange
jamais impunément. L'homme McDonalisé dev~a finalement
nécessairement rendre des comptes à la fois sur le plan physiologique,
psychologique, économique et sociologique. Cette
McDonalisation concerne des restaurants en propriété et
d'autres en franchise. L'objectif de cette étude n'est pas de
rendre compte des diversités de situation pouvant éventuellement
exister mais bien plutôt de percer les "secrets" du système
McDo. Nous nous sommes heurtés à de nombreuses
difficultés d'accès aux documents internes systématiquement
classés "secret défense" par la direction de la "communication".
Un tel ostracisme peut être responsable de certaines
bévues ou de l'ignorance des ultimes modifications apportées
à la conception ou à la fabr~cation de tel ou tel produit. Nous
pensons cependant qu~ cette opacité ne nuit pas à la compréhension
de la logique du système qui par définition ne se
réduit pas à la somme de ses propres éléments. Cet ouvrage
entend donc frayer quelques pistes même encore broussailleuses
pour établir un premier bilan (1). Peut-être n'est-il
pas trop tard pour présenter collectivement l'addition à
McDo ? Peut-être peut-on encore rêver pour demain à une alimentation
comblant à la fois le gastronome, le parent et le
citoyen?
(1) Mes remerciements à mes étudiants de l'Université de Lyon II et
l'Institut Vatel de Lyon qui ont participé à mes divers séminaires
consacrés aux formes d'alimentation.
10
Première partie
Planète Mac
"ça se passe comme ça chez McDonald's"
Devise du XXle siècle
McDonald's constitue un prototype de l'entreprise moderne.
Il est ainsi selon sa propre formule beaucoup plus qu'un
simple restaurant. Il anticipe sur un futur qui déborde la
question de la restauration ou mê~.e de l'alimentation. Il
invente en effet une nouvelle façon de concevoir la place de
l'homme dans l'entreprise et donc aussi dans la société. Cette
modernité se caractérise avant tout par un formidable processus
d'homogénéisation. Cette standardisation concerne bien
sûr le produit lui-même c'est-à-dire ses matières premières,
son mode de fabrication, de commercialisation et même son
mode de consommation. Cette homogénéisation s'étend également
à ses formes de gestion de ses fournisse1.1rS, de ses
salariés et même bien sûr de sa clientèle. Ce nivellement ne
doit rien au hasard. Il est voulu, pensé, et organisé et ceci
dans le moindre détail. Il fait système au sens où il produit un
sens qui dépasse la signification de chacun de ces éléments.
Ce "système" McDo est consigné "scientifiquement" dans près
de 25 000 manuels ou fiches techniques qui s'imposent à
l'échelle mondiale. La pre.sse relève avec gourmandise
quelques dy~fonctionnements ou défauts dans l'application
de telle ou telle de ses normes standard. Chacun s'évertue à
prendre McDo en défaut par rapport à sa logique. Nous pensons
pour notre part que cette logique est en elle-même beaucoup
plus préoccupante que les loupés saris doute inévitables.
(...)

 

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2 juin 2014

libérer l'école de la pub !

Libérer l'école de la pub (Paul Ariès)


Une tribune de Paul Ariès, publiée en septembre 2003 par Libération.



Libérer l'école de la pub.

Chaque rentrée scolaire est l'occasion de transformer un peu plus les enfants en hommes-sandwichs pour le profit des grandes marques. Le Mouvement pour une rentrée sans marques est né à l'initiative de Casseurs de pubs, des jeunes qui refusent de devenir de la chair à pub pour les guerres économiques. Ce débat sur la place de la publicité à l'école pèse 100 milliards d'euros, et concerne 12 millions d'enfants scolarisés. L'enfant d'âge scolaire développe ses valeurs et ses goûts : ce qui est acquis durant cette période reste acquis toute la vie. Les deux tiers des produits consommés à cet âge le seront aussi à l'âge adulte. L'Europe, consciente des dangers, recommande des codes de bonnes conduites. Ils feraient merveille là où la publicité scolaire est autorisée en raison d'un vide juridique (Irlande, Italie, Pays-Bas, Autriche, Danemark, Espagne, Suède, Finlande et Royaume-Uni) et pourraient se substituer aux lois là où elle est normalement interdite (Allemagne, Belgique, Grèce, Luxembourg, Portugal et... France).

La France, qui s'apprête à fêter le centenaire des lois de laïcité, oublie pourtant que son but à l'école est de défendre la capacité de jugement. Nos anciens savaient que la publicité est contraire à tout projet éducatif : c'est pourquoi, bien que beaucoup moins victimes que nous, ils avaient tenu dès 1936 à poser le principe de son interdiction. Cette protection a été réaffirmée en 1952 puis en 1967 et 1976. L'administration a cependant peu à peu violé sa propre règle. Un inspecteur a même été condamné, en 1993, pour avoir «méconnu le principe de neutralité scolaire» en s'associant à une banque. Le ministre (socialiste) de l'Education nationale, Jack Lang, avait alors, sous prétexte d'assouplir et de moderniser le texte, troqué le vieux principe d'interdiction contre celui de «neutralité commerciale».

Pourquoi l'Etat a-t-il choisi de désarmer l'école au moment précis où elle devenait l'objet de toutes les agressions ? L'enseignement constitue le dernier grand marché disponible avec 875 milliards d'euros par an. Cette invasion publicitaire est aussi inséparable de la volonté des «maîtres du monde» de s'approprier son contenu éducatif. Les grands patrons réunis au sein de la Table ronde européenne (ERT), véritable clone du Gate américain (Global Alliance for Transnational Education), ne le cachent pas : «Le monde de l'éducation ne semble pas bien percevoir le profil des collaborateurs nécessaires à l'industrie [...] L'éducation doit être considérée comme un service rendu au monde économique.»

Le développement de la publicité à l'école est pourtant une abomination. Elle laisse croire aux enfants que le bonheur serait dans la consommation. Comme si posséder dix paires de baskets permettait de courir dix fois plus vite. Plus grave encore : elle donne l'illusion qu'il serait possible de compenser les carences narcissiques et la perte des repères par la consommation de produits de marques qui fonctionnent comme des identités de substitution : on a des enfants Nike, Coca-Cola, etc. L'Etat ouvre parallèlement l'accès de l'école aux entreprises sous prétexte de développer le partenariat : mallettes pédagogiques (Nestlé fait la publicité de son chocolat en poudre Nesquick et de ses céréales sous prétexte de présenter un petit-déjeuner équilibré, Kellogs poursuit ses opérations en maternelle, Colgate-Signal propose une éducation au brossage des dents, Danone a conçu un coffret pédagogique «alimentation plaisir», etc.), sponsoring (McDonald's, Coca-Cola, Leclerc, etc.), encarts publicitaires dans les plaquettes des établissements, journaux gratuits truffés de pub déposés dans les écoles...

L'Europe doit-elle s'aligner sur le Canada ou les Etats-Unis ? Des entreprises canadiennes ont créé la Conférence Kid Power pour défendre le droit des enfants à être considérés comme des consommateurs comme les autres. Les écoles américaines récoltent 750 millions de dollars par an via la pub. Mais à quel prix ? Les élèves de 11 à 17 ans ont l'obligation de regarder, pendant au moins 90 % des jours scolaires, un journal télévisé de dix minutes comprenant deux minutes de pub. Des marques obtiennent le droit de faire figurer leur logo sur les murs des lycées, dans les cours de récréation, sur le sol des gymnases, sur les rideaux des réfectoires, dans les bus scolaires, etc. L'apprentissage à la lecture et au calcul se fait avec des personnages emblématiques de marques ou des mises en situation de consommation. Des classes sont sponsorisées par des marques qui leur fournissent «gratuitement» des produits «pédagogiques» labellisés, des jeux, des cassettes vidéo, des cahiers d'exercices, des échantillons gratuits. Des établissements imposent le port de tee-shirt avec des publicités, d'autres remplacent les images par des bons d'achat ou de réduction.

Pizza Hut a lancé son programme «Book It !» avec l'agrément du ministère. Les bons élèves sont accueillis par le manager d'un Pizza Hut qui leur offre autocollants, médailles, diplômes et une part de pizza : 300 millions d'enfants ont déjà participé à cette opération. Domino Pizza distribue gratuitement des manuels scolaires mais proportionnellement au nombre de pizzas commandées le midi à la cantine. Les écoles signent des contrats d'exclusivité avec des géants du soda prévoyant des objectifs de vente, par exemple 50 canettes par an et par élève, ainsi qu'un nombre minimum de distributeurs dans les couloirs de l'école. Les instituteurs qui acceptent de couvrir leur voiture avec des autocollants publicitaires reçoivent de l'argent. En échange, les sociétés organisent des dégustations d'échantillons lors de leurs cours. Les élèves sont également «loués» à des sociétés spécialisées qui étudient leur comportement d'achat et les utilisent comme précurseurs de tendance. Tout ceci a lieu durant les cours et occupe jusqu'à 10 % du temps scolaire.

La lutte contre la publicité à l'école prend deux formes. Le refus de certains jeunes d'être transformés en hommes-sandwichs : ces «démarqueurs» se caractérisent par des tenues ou des matériels vierges de tout logo ou mention publicitaire. Et le refus de certains enseignants d'être instrumentalisés par des marques.

La publicité à l'école repose sur une confusion des registres : est-on à l'école pour apprendre à devenir un «bon» consommateur ? La pub, ce n'est pas la culture des jeunes mais une anticulture. La culture, plus on la fréquente tôt, plus on devient un adulte autonome. La pub, plus on y est soumis tôt, plus on devient «accro» aux marques. Les enfants ne sont pas de la chair à pub. Et nous ne voulons pas de «dealers» de marques à proximité ou dans les écoles ! Exigeons l'abrogation de la circulaire du 28 mars 2001 !

http://www.liberation.fr/tribune/0101453514-liberer-l-ecole-de-la-pub

Paul ARIES - Site Officiel
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